Hello ! I need some med- oh no ! PV. Magdalena

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tout ce qui t'entoure, toi vile créature aux dents plus crochues que les ongles d'un ours, n'est qu'illusion.

il n'y a qu'à comparer ton petit commerce avec son arrière-boutique. une devanture bien agencée, des petites loupiotes noyant la pièce d'une douce lumière tamisée, quelques panneaux indiquant les nouvelles arrivées dans tes potions magiques, et autres onguents. il y avait même un carillon, sifflant joyeusement quand chaque client passe la porte.
tu étais assez fière de garder les apparences, évitant de te cacher partout où tu allais. tu confectionnais tes remèdes avec aisance, ne regardant guère les recettes que tu avais sous la main : en réalité, tu connaissais les bouquins sur le sujet par coeur à présent. tu avais été noyé dans le jus en étant plus jeune, de fait, tout te venait naturellement, comme si tu avais toujours fait cela. un peu de zeste de citron, pour le goût, et bien d'autres ingrédients dont tu connaissais le secret. ça te berçait, un peu, de faire tout cela. ça t'arrachait d'un monde qui assassinait tes frères et soeurs, d'un monde qui te traque en permanence, un monde sur le point de tomber en miettes tant il était mal foutu. tu n'avais aucun remord à balancer tout cela : c'était rien de plus que la vulgaire vérité qui régissait ce sale monde. et contre tout tu devais constamment te battre, pour mériter ta place dans cette symphonie détraquée.
mais sous ton bureau, il y avait un petit tiroir que tu n'ouvrais que lorsqu'aucun client ne pouvait te voir, t'épier. tu tirais une fois le tiroir avec une légère force maîtrisée, et le pactole brillait sous tes yeux. plein de petits flacons, dont la plupart était pourpre et opaque, laissant pensant qu'il ne s'agissait guère là d'une ribambelle de remèdes faits avec amour. en réalité, c'était bel et bien une série de petits poisons : il fallait faire de tout, sans quoi, ton nom sonnerait creux. les fioles étaient assez minuscules, mais pour la plupart, très toxiques, capable d'achever un ours. un peu de poison badigeonné sur une lame, et vous voilà avec un champs entier d'hommes morts, tombés au combat par l'injection très efficace d'une poison bien ficelé. tu étais très fière de cette partie de ton travail : tu aimerais confectionner avec tendresse les poisons, parfois simplement du chloroforme ou autres substances qui enroule l'esprit autour d'une réalité qui n'est pas. tu aimais toucher à tout, même à la mort, et surtout pour cette dernière.

et puis, à côté, ton arrière-boutique était plutôt glauque.
très mal éclairée, il y avait des tiroirs remplis d'animaux morts, certains déjà en décomposition depuis quelques jours, dont tu avais oublié de te débarrasser. tu trouves le sang qui t'apaise, tu t'envoles, un peu comme lorsque tu avales les fumées d'opium. cette mise en revue vous ferez bien comprendre une chose : comme ton commerce, tu es à la fois deux choses : la partie qui sauve les meubles, toujours polies et souriantes, puis l'autre partie qui tombe dans les méandres des ténèbres, qui ne trouve rien de mieux à faire mis à part de croquer dans des moineaux morts noyés. et tu ne cesseras sûrement jamais de te comporter comme cela. tu as grandi comme cela, tu as détruit comme cela, et tu mourras comme cela. mais tu ne mourras pas avant d'avoir laisser un souvenir de toi gravé dans la pierre du temps.

aujourd'hui, peu de monde s'était retrouvé dans ton commerce. c'était un jour calme, reposant. et tes oreilles bougèrent étonnamment, dans un petit soubresaut, lorsque le carillon tinta, d'une douce mélodie qui te rappelait de faire ton travail avec entrain et ferveur.
— bonjour madame, que puis-je faire pour-... vous.
tout ton entrain déguerpit sans faire de révérence et ton sourire se mit à dépérir. machinalement, tu le gardas scotché sur ton visage, comme s'il tenait avec de la chaux brûlante. tes yeux, eux, ne suivaient pas ton sourire faux : ils gardaient une froideur palpable, capable d'égorger un petit âne rien qu'en le regardant. tu utilisais jusqu'à présent ta plume pour lister l'inventaire qu'il y avait plus loin dans l'arrière-boutique, et elle se brisa. des plumes retombèrent sur le dos de ta main, marquant l'atmosphère déjà très tendu. l'ambiance pourrait éclater si jamais la chasseresse trouvait les bocaux remplis d'oeils de vampire, tous alignés sur une étagère dans la pièce la plus au fond de l'entièreté de la boutique.

ton visage s'habilla d'un sourire carnassier, accompagnés d'yeux qui s'imaginaient les veines du paladin. tes ongles tapèrent à l'unisson sur le petit meuble qui faisait office de caisse. un petit rire lugubre sortit de ta bouche, comme pour te moquer de la jeune dame un peu trop sûre d'elle.

— je remplace l'ancien apothicaire qui a dû fermer boutique. c'est un travail qui me grandit, que j'apprécie.

tu fis tinter deux petites fioles entre elles. le bruit gagna rapidement l'échoppe entière, tellement le froid s'installait sans pudeur aucune dans la pièce. ton envie de jouer avec ce qui était remède et ce qui était poison, pas pour tuer, non non, ce serait une perte de temps pour très peu d'amusement. non, tu parles là d'amocher, de briser légèrement, assez pour se relever en quelques jours. juste de quoi faire briller ta journée, sachant que la sienne la laisse clouer dans son pauvre lit. tu avais tant d'idées qui bourgeonnaient dans ta petite tête, et tu ne savais guère laquelle était la meilleure dans tout le lot. mais avant cela, il te fallait tenter le dialogue, pour calmer tes propres intentions.

— la question n'est pas si j'ai tout ce dont vous avez besoin, mais en réalité est si vous me faites assez confiance pour vous prescrire un petit remède, n'est-ce pas ?

ton sourire se mit à s'élargir, comme sorti d'un des contes que l'on raconte sur la place pour faire peur aux petits enfants de certains arrondissements. tu allais te délecter de tout cela. tu léchas tes babines un peu comme un chat sauvage. tu étais le chat, et la proie venait t'entrer volontairement chez toi.